Certaines localités ont été exposées de tout temps à des inondations, de par leur situation au bord des lacs et des cours d'eau, dans les plaines (surtout dans le Grand-Marais) et dans les vallées alpines (catastrophes naturelles). Dès le Moyen Age, les dégâts furent consignés dans des chroniques, puis, dès le XVe siècle, dans des carnets journaliers d'observation des conditions météorologiques et dans des documents administratifs. Beaucoup d'observateurs tentèrent de décrire l'ampleur des inondations et de les comparer avec des événements antérieurs. Ils se référaient à des repères de hautes eaux souvent placés sur des ponts ou des bâtiments. L'importance des inondations historiques peut aussi être mesurée à leur étendue et aux dommages causés. La première échelle de mesure du niveau des eaux fut installée dans le lac de Zurich par Johann Jakob Scheuchzer en 1708. Le niveau du lac Léman a été contrôlé dès le début du XVIIIe siècle, celui du lac de Constance dès 1797 et celui du lac Majeur dès 1829. A Bâle, le cours du Rhin a été enregistré depuis 1808, d'abord au moyen d'un fluviomètre, puis, dès 1869, par un limnigraphe. Le débit des grands cours d'eau et le niveau des lacs sont mesurés de manière systématique depuis la fin du XIXe siècle. Les études historiques, basées sur les corrélations et les comparaisons transversales entre des mesures d'écoulement, des échelles d'étiage, des cotes de hautes eaux et des rapports écrits, autorisent une vue d'ensemble de la fréquence et des causes de débordements fluvio-lacustres dans le Moyen Pays et au centre de l'espace alpin.
Parmi les causes des inondations, on distingue d'une part la prédisposition naturelle, qui désigne les circonstances avant l'événement, par exemple un sol saturé en raison de précipitations abondantes ou l'accumulation de grandes quantités de neige (climat), d'autre part le mécanisme de déclenchement. En Suisse, celui-ci est dû généralement à des précipitations intenses, aggravées par la fonte des neiges, en hiver dans le Moyen Pays, au printemps et au début de l'été dans les montagnes. Dans les Alpes, le mouvement ascensionnel de grandes masses d'air humide et la pluie qui en résulte jouent un rôle important. Au centre et au sud des Alpes, de graves inondations sont provoquées entre fin août et début novembre en raison de la dépression du golfe de Gênes (poche d'air froid sur les régions méditerranéennes). De grandes masses d'air chaud et humide en provenance de la Méditerranée sont ainsi poussées vers les Alpes, entraînant, à certaines conditions, de fortes averses sur des aires limitées. Ce fut le cas notamment à Brigue en septembre 1993 et lors du glissement de terrain à Gondo en octobre 2000. Dans ces circonstances, lorsqu'un front froid arrive vers les Alpes par le nord, les masses d'air chaud et humide provenant du sud entrent en contact avec lui, causant des chutes de pluie considérables sur les versants septentrionaux des Alpes (par exemple en août et septembre 1890). Lorsque de graves inondations surviennent dans les Alpes suisses, le périmètre des dégâts s'étend généralement jusqu'en Italie du Nord, en Autriche ou au sud-est de la France.
Le Rhin a inondé la région de Bâle à maintes reprises: en 1342 («crue millénaire»), 1480, 1511, 1566, 1570, 1641, 1651, 1673, 1711, 1764 et 1801. Entre 1500 et 1882, on compte en moyenne une inondation tous les neuf ans et demi. Au XIXe siècle, les plus hauts niveaux du fleuve furent atteints en 1817, 1852, 1876, 1881 et 1882. Dès cette époque et jusqu'en 1994, Bâle fut épargnée par les crues. Le dernier débordement du Rhin remonte à 1999. L'interprétation du phénomène à partir du XIXe siècle est ambivalente: d'un côté, la correction des eaux (principalement du Jura), le reboisement et l'extension des forêts dans les Alpes et dans les régions élevées du Moyen Pays, ainsi que la création de lacs d'accumulation dans les Alpes ont contribué à réduire les risques de crues. A l'inverse, l'assèchement des zones humides, l'endiguement des cours d'eau, le bétonnage du sol (doublement des surfaces bâties depuis 1950) et l'industrialisation de l'agriculture (machines agricoles plus lourdes) ont accentué les risques. Le régime des précipitations s'est en outre sensiblement modifié depuis la fin du XIXe siècle, les printemps, étés et automnes étant devenus un peu plus secs dans les Alpes et parfois aussi dans le Moyen Pays.
Le niveau du lac de Constance dépend de la rapidité de la fonte des neiges, ainsi que de l'intensité des précipitations qui viennent parfois s'y ajouter. En 1566, le lac déborda à la suite de chutes de neige exceptionnelles dans les Alpes, dues à une situation de nord-ouest persistant durant l'hiver. Le Rhin resta pendant six semaines à son niveau le plus haut. L'inondation de l'été 1817 s'explique par une double fonte des neiges dans les Alpes (hiver 1815-1816, hiver 1816-1817) en raison de l'année dite «sans été» (1816). Le lac de Constance déborda quatre fois entre 1849 et 1855. L'inondation de mai 1999 s'explique par une abondante fonte des neiges, accompagnée de fortes précipitations.
Le lac Léman, alimenté principalement par le Rhône, déborda à plusieurs reprises au XXe siècle, ainsi, par ordre d'intensité décroissante, en 1948, 1987, 1954, 1935, 1937 et 1936. Plus loin dans le temps, des crues sont mentionnées en 1817, 1846, 1792 et 1816.
Dans les Alpes centrales, on peut distinguer deux périodes de basse fréquence (1641-1706 et 1927-1975) et trois périodes de haute fréquence d'inondations (1550-1580, 1827-1876 et 1976-2000). Les nombreuses inondations qui sévirent entre 1827 et 1876 furent imputées par les contemporains à la surexploitation des forêts qui avait alors atteint son paroxysme en raison des besoins croissants de la population et de l'exportation illimitée du bois. L'idée que la forêt contribuât à régulariser le débit de l'eau s'imposa en France dès la fin du XVIIIe siècle. Elle prévalut en Suisse dès les années 1850, à la suite de nombreuses inondations et grâce à l'influence de la Société forestière suisse, créée en 1843. Cependant, les précipitations automnales sur le versant sud des Alpes étaient à cette époque nettement plus fortes que dans les périodes précédentes et suivantes, en raison de variations climatiques naturelles. L'inondation de 1868 dans les Alpes provoqua un tel choc que le Parlement accéda à la demande de la Société forestière suisse de disposer d'une législation fédérale prenant le pas sur la souveraineté cantonale et le droit de propriété, et accepta aussi l'octroi de subventions fédérales pour des reboisements dans les Alpes et les Préalpes (loi fédérale sur les forêts de 1876 et loi fédérale sur la police des eaux de 1877, sur la base d'un nouvel article constitutionnel de 1874). Le nombre d'inondations de grande ampleur a de nouveau augmenté depuis 1976 dans les Alpes centrales et méridionales. A fin août 2005, des pluies diluviennes se sont abattues sur l'Oberland bernois et la Suisse centrale, provoquant la montée des eaux des lacs à un niveau record et la coupure des voies de communication dans de nombreuses vallées. Le montant des dégâts (2,5 milliards de francs) est de loin le plus élevé des deux derniers siècles.
Certaines inondations historiques survenues dans les Alpes ont été causées par la rupture de lacs glaciaires (lac de Mattmark, Drance de Bagnes) ou de lacs de retenue formés à la suite d'éboulements (Buzza di Biasca). Le glacier de Giétroz, en avançant, provoqua à plusieurs reprises (1595, 1818, probablement vers 565) la chute d'importantes masses de glace dans la Drance, formant à chaque fois un lac retenu par une digue glaciaire; lorsque celle-ci se rompait, le lac se déversait dans la vallée, détruisant tout sur son passage.
Pendant longtemps, les hommes réussirent à échapper aux dangers de l'eau en construisant leurs habitations en lieu sûr. Dès le XVIe siècle pourtant, les plus pauvres furent contraints de s'installer dans des zones potentiellement inondables, par exemple les Schachen (berges) de l'Emme. Les communes ou des consortages contrôlaient de façon rudimentaire les eaux et les berges. Les rives dangereuses devaient être protégées par des digues en pierre et clayonnages appelées Wuhren, construites de biais pour casser le courant. Dès le XIXe siècle, des travaux de correction des eaux furent entrepris par les cantons et la Confédération, qui assurèrent la coordination et l'octroi de subventions. Pour lutter contre les ravages des crues, on rehaussa les digues, on canalisa les torrents et on construisit des écluses pour réguler le niveau des lacs. La gestion de celles-ci, en période de hautes eaux, provoqua régulièrement des conflits entre les riverains de l'amont et ceux de l'aval. Dès 1982, des plans plus globaux s'imposèrent, qui prirent en compte l'importance de l'eau comme biotope, paysage et zone de détente (rétablissement du cours naturel des rivières) et qui furent intégrés dans la nouvelle loi sur la police des eaux de 1991. Celle-ci n'a pas été appliquée de façon conséquente jusqu'à aujourd'hui. Certaines voix se sont élevées pour réclamer davantage d'espace pour l'eau et afin d'interdire toute construction dans les zones à risque, mais sans résultat. Les inondations d'août 2005 pourraient bien faciliter la mise en œuvre des mesures préconisées.
Sous l'Ancien Régime, les dommages causés par les inondations étaient partiellement couverts par l'aide de proximité (communes voisines) et des «patentes de collecte», dès le XIXe siècle, par des aides cantonales ou fédérales. Depuis le début du XXe siècle, les dégâts naturels sont inclus dans les assurances cantonales des bâtiments (assurances).