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Pharmacie

Officine en 1612, miniature dans le livre de famille du pharmacien bâlois Emanuel Ryhiner, p. 129 (Pharmaziemuseum der Universität Basel).
Officine en 1612, miniature dans le livre de famille du pharmacien bâlois Emanuel Ryhiner, p. 129 (Pharmaziemuseum der Universität Basel).

La pharmacie s'occupe de la fabrication, de l'analyse, du contrôle et de la distribution des médicaments. Au Moyen Age, cette tâche était dévolue en Europe aux médecins ou à d'autres guérisseurs et faisait partie de toute activité thérapeutique. Dès le XIe s., cette science intégra des préparations en provenance du monde arabe (Plantes médicinales). La naissance de la pharmacie remonte à la constitution de Melfi édictée par l'empereur Frédéric II en 1231 et à l'ordonnance médicale qu'il promulgua vers 1241. Celle-ci prescrivait un contrôle des pharmaciens par les autorités, l'emploi d'une pharmacopée, le recours à un système de taxes et la séparation des activités médicales et pharmaceutiques.

Pharmacie portative en bois peint de la première moitié du XVIIIe siècle provenant des Grisons (Pharmaziemuseum der Universität Basel; photographie A. & G. Zimmermann, Genève).
Pharmacie portative en bois peint de la première moitié du XVIIIe siècle provenant des Grisons (Pharmaziemuseum der Universität Basel; photographie A. & G. Zimmermann, Genève). […]

Le serment des apothicaires de Bâle, rédigé probablement entre 1309 et 1321 durant le mandat du bourgmestre Thüring Marschalk (1271-1322), peut être considéré comme le premier règlement sur la pharmacie en Suisse. A la Renaissance, puis durant les siècles qui suivirent, les substances disponibles évoluèrent profondément, ce qui consolida le rôle de la pharmacie. Lors de l'introduction en Europe de plantes originaires d'Amérique (par exemple le gaïac), divers herbiers, comme ceux d'Otto Brunfels, Leonard Fuchs et Hieronymus Bock, virent le jour, renouvelant ainsi la botanique. Sous l'impulsion des théories de Paracelse et de ses partisans, la pharmacie comprit également des médicaments spagyriques. A l'époque des Lumières, elle se débarrassa de ces diverses approches ainsi que de nombreux produits, devenus obsolètes. Cette réforme déboucha, en Suisse, sur la publication de pharmacopées ou codex: la Pharmacopoea Helvetica, publiée à Bâle en 1771 avec une préface d'Albert de Haller, était valable pour les treize cantons; la Pharmacopoea Genevensis fut éditée vers 1780.

Dans le sillage de la diversification des sciences au XIXe s., de nombreux pharmaciens, comme le Genevois Henri-Albert Gosse, participèrent à la fondation de sociétés savantes, consacrées aux sciences naturelles. A la même époque, l'entrée de la pharmacie dans les universités transforma la discipline. Par leurs travaux de pharmacologie et de botanique, quelques professeurs connus, comme Friedrich August Flückiger et Alexander Tschirch à Berne, Carl Hartwich à Zurich et Robert Chodat à Genève, acquirent une réputation internationale; de nombreux pharmaciens allemands occupèrent d'importantes fonctions dans les universités suisses, influençant la politique professionnelle. La Pharmacopoea Helvetica de 1865 remplaça les pharmacopées allemandes et françaises, souvent utilisées jusque-là, et les codex cantonaux, comme ceux du Tessin (1844) ou de Schaffhouse (1865). En 1989, une loi fédérale sur la pharmacopée confirma le caractère officiel du codex suisse; elle sera abrogée par celle sur les médicaments et les dispositifs médicaux, entrée en vigueur en 2002. Depuis 1964, la Suisse collabore à l'élaboration de la Pharmacopoea Europea.

Avec les premiers médicaments de synthèse et le développement parallèle de l'industrie pharmaceutique (Industrie chimique), les remèdes déjà fabriqués remplacèrent à la fin du XIXe s. ceux préparés dans les officines. Le pharmacien passa du statut d'artisan à celui de conseiller spécialisé ayant reçu une formation scientifique. Vers 1900, des instituts de pharmacie furent fondés dans les universités de Zurich, Bâle, Berne, Genève et Lausanne (celui de l'université de Berne ferma en 1996).

Les principes de la Constitution de 1848 permirent une libéralisation du secteur de la santé qui aboutit à la vente directe de médicaments par les médecins dans quelques cantons moins restrictifs, particularité helvétique en Europe. Cette frontière floue entre médecine et pharmacie entraîna un conflit qui n'est toujours pas réglé en Suisse alémanique. L'Office intercantonal de contrôle des médicaments, fondé en 1900, accordait les autorisations de mise sur le marché et décidait quels médicaments étaient délivrés sur ordonnance; il était de ce fait coresponsable du contrôle de la distribution. La première loi fédérale sur les stupéfiants, en application depuis 1924, prévoyait la surveillance de certains médicaments. La nouvelle loi sur les médicaments et les dispositifs médicaux est entrée en vigueur en 2002. Son exécution revient aux cantons et à Swissmedic (Institut suisse des produits thérapeutiques), né, dans cette optique, de la réunion de l'ancien Office intercantonal de contrôle des médicaments et de l'unité en charge de ce dossier auprès de l'Office fédéral de la santé publique.

Sources et bibliographie

  • J. A. Häfliger, Geschichte der ersten 100 Jahre des Schweizerischen Apotheker-Vereins, 1946
  • R. Ebnöther, H. Keller, Bibliographie zur Schweizer Pharmaziegeschichte, 1992
  • F. Ledermann, éd., Biogr. des pharmaciens suisses, 1993
  • R. Schmitz, Geschichte der Pharmazie, 1, 1998
  • A. Dolivo, La pharmacie vaudoise au temps de la prépondérance radicale 1845-1945, 2000
  • M. Kessler et al., Strömung, Kraft und Nebenwirkung, 2002
Liens

Suggestion de citation

François Ledermann: "Pharmacie", in: Dictionnaire historique de la Suisse (DHS), version du 28.09.2010, traduit de l’allemand. Online: https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/008282/2010-09-28/, consulté le 18.04.2024.