Les affranchis étaient d'anciens esclaves (Esclavage) ou serfs (Servage) libérés. Leur existence est attestée dans les lois germaniques (Lois barbares) et, pour ce qui concerne le territoire helvétique, par des cartulaires et formulaires comme ceux des abbayes de Saint-Gall à partir de la fin du VIIIe s. ou de Zurich dès 950. Ils montrent qu'au haut Moyen Age et au Moyen Age classique, les affranchis n'acquéraient pas une liberté totale, mais qu'ils formaient une couche sociale intermédiaire entre les non-libres et les Hommes libres.
Qu'il fût accordé par le seigneur (manumissio per cartam) ou par l'Eglise sous l'influence du droit romain (manumissio in ecclesia), l'affranchissement avait pour principal effet la suppression des obligations d'obéir et de servir. Les droits mentionnés dans les lettres de manumission, tels que la liberté de domicile, celle d'exercer un métier de son choix et de posséder des biens propres, l'égalité avec les hommes libres de naissance ou le titre de civis romanus ne correspondaient guère à la réalité, selon laquelle, conformément à la sensibilité juridique de l'époque, l'affranchi devait se remettre sous la dépendance d'un protecteur pour éviter de retomber dans le servage. Les affranchis optaient de préférence pour le protectorat ecclésiastique (defensio, mundiburdum), plus rarement séculier, en échange d'un cens recognitif, versé chaque année (argent, cire). S'il assurait à l'affranchi une sécurité aussi bien sociale qu'économique, le rattachement à la Familia d'un seigneur ecclésiastique ou séculier le liait donc à ce dernier en tant que censitaire.
La loi franque accordait à l'affranchi une pleine liberté en vertu de l'usage, peu répandu dans l'aire alémanique, de la denariatio ou manumissio per denarium: pour symboliser la libération du censitaire, le roi tapait sur la main du serf pour en faire jaillir un denier. Comme le statut d'homme libre était hautement convoité, il se payait fort cher. La couche grandissante de "demi-libres" de statuts divers (liberti, liti, coloni, accolae), attira aussi des hommes libres soumis à des protecteurs ecclésiastiques. Vers la fin du Moyen Age, serfs et anciens hommes libres finirent par s'y confondre en des associations d'"hommes propres" ou de Serfs de la Maison-Dieu, ainsi nommés selon qu'ils dépendaient d'un seigneur séculier ou ecclésiastique. Entre le XIVe et le XVIe s., des individus, voire des communes et des bailliages entiers se rachetèrent successivement du chevage et du droit de Mainmorte; comme Sujets, ils furent désormais astreints à l'impôt et au service militaire.