17.12.1765 à Fribourg, 6.3.1850 à Fribourg, cath., de Fribourg. Fils de Jean-François, commerçant, et de Marie-Françoise de Landerset. Frère de Jean-François (->) et de Jean-Louis (->). De sa mère, qui lui donna ses premières leçons à la maison et le surveilla lorsqu'il enseigna à son tour aux cadets, G. apprit la tolérance religieuse et l'éducation sans punition. Il suivit l'école latine à l'ancien collège des jésuites, dont la méthode mécanique d'enseignement le déçut. Entré dans l'ordre des franciscains à Fribourg en 1781, il fit son noviciat à Lucerne (1782), puis ses études de philosophie et de théologie à Wurtzbourg (1783-1788), où il fut impressionné par l'action sociale du prince-évêque Ludwig von Erthal. Il trouva dans la lecture des Saintes Ecritures un équilibre entre le rationalisme des Lumières et la théologie dogmatique. Ordonné prêtre en 1788 à Fribourg, il fut professeur de philosophie et prédicateur à Überlingen jusqu'en 1789, puis à Fribourg dès 1790. En 1798, G. présenta un Projet d'éducation publique en réponse à l'appel lancé par Philipp Albert Stapfer, ministre de l'Instruction publique sous la République helvétique, qui le nomma archiviste à Lucerne. Aumônier du gouvernement à Berne jusqu'en 1803, il y célébra la première messe depuis la Réforme. Ses dispositions œcuméniques et la sobriété de sa liturgie, partiellement en allemand, contribuèrent grandement au maintien des catholiques à Berne, même après l'Helvétique.
Revenu à Fribourg, G. dirigea l'école des garçons (1805-1823), qu'il développa en une école primaire publique exemplaire. Il mit l'accent sur un enseignement vivant de la langue, propre à transmettre simultanément des valeurs morales et religieuses. Pour ce faire, il créa une Grammaire des campagnes à l'usage des écoles rurales du canton de Fribourg (1821). Le retour des jésuites provoqua des tensions avec l'autorité religieuse qui s'était prononcée pour le rétablissement du pouvoir de l'Eglise sur l'instruction, à l'opposé de l'école publique créée par G. La méthode d'enseignement mutuel qu'il préconisait fut attaquée. Les partisans des jésuites ne purent pas non plus admettre son idée d'une école secondaire orientée sur les besoins de l'industrie (cours de géométrie) et du commerce (cours d'anglais). Insensibles à la valeur de ses moyens d'enseignement, les curés de campagne s'en tenaient au Petit Catéchisme de Pierre Canisius. Fuyant le conflit, G. se rendit à Lucerne où il enseigna la philosophie de 1823 à 1834. Membre du conseil d'éducation et de la Société suisse d'utilité publique, il fut un pionnier de la formation des jeunes filles et de celle des maîtres d'école. Rentré à Fribourg en 1835, il rédigea sa principale œuvre pédagogique, De l'enseignement régulier de la langue maternelle dans les écoles et les familles (1844), récompensée par le prix Montyon décerné par l'Académie française. G. mourut en 1850, douloureusement frappé par la sécularisation de son couvent par le gouvernement radical.
G. fut l'un des principaux créateurs de l'école publique en Suisse, mais méconnu par les partisans de Pestalozzi en raison de son Rapport sur l'Institut Pestalozzi à Yverdon (1810). Il y estimait que cette entreprise, dont il reconnaissait pourtant la valeur morale et la méthode, n'était pas applicable à la réalité d'une école publique populaire. Contrairement à Pestalozzi, G. prenait en compte l'administration scolaire et les intérêts de l'Etat, ce qui fait de lui un important réformateur de l'école. Les catholiques ne lui pardonnèrent pas son engagement en faveur de l'école publique et il fut vite oublié des milieux protestants. En 1990, la Fondation du père Grégoire Girard a été créée à Fribourg pour revivifier la recherche.