
On entend par tribunaux d'Empire les deux cours suprêmes du Saint Empire romain germanique, actives de 1495 à 1806, ainsi que diverses instances royales et impériales qui les avaient préfigurées, au nord des Alpes. L'empereur Frédéric II ébaucha une juridiction centrale en instituant en 1235 un juge chargé de présider en son nom le tribunal royal de la cour. Ce dernier fut remplacé en 1451 par la Chambre royale, institution siégeant elle aussi à la cour, présidée soit par le souverain, soit par le juge de la Chambre, et mentionnée pour la première fois en 1415. L'un et l'autre jugeaient surtout en appel. Lors de la réforme de l'Empire adoptée en 1495, on créa deux tribunaux suprêmes aux compétences semblables: la Chambre impériale (Reichskammergericht), soumise à l'influence des Etats de l'Empire, et le Conseil aulique (Reichshofrat), dominé par l'empereur. La première, organisée en 1495 déjà, avait pour président (premier juge, Kammerrichter) un noble nommé par l'empereur; elle siégea à Spire (dès 1527), puis à Wetzlar (dès 1690) et servait surtout à maintenir la paix territoriale. Elle comprenait seize assesseurs (nombre porté à cinquante en 1648) nommés par les Etats de l'Empire. Le second, dirigé par l'empereur ou par un noble ayant le titre de président du Conseil aulique, fut organisé en 1559; il avait son siège à la cour impériale à Vienne et comptait au maximum trente membres nommés par l'empereur.
Il y eut en outre au bas Moyen Age des tribunaux royaux régionaux ayant des attributions semblables à celui de la cour. Celui de Rottweil avait compétence pour l'ancien duché de Souabe et donc pour une grande partie de la Suisse alémanique. En 1362, l'empereur Charles IV en instaura un à Zurich qui fonctionna jusqu'en 1400 au moins et qui reçut des plaintes provenant notamment du Valais. En 1356 déjà, le comte de Savoie avait obtenu de l'empereur le privilège de créer un tribunal d'Empire pour son comté et pour les seigneuries ecclésiastiques voisines, mais il ne put concrétiser ce droit qu'à Lausanne, sous la forme du "juge de Billens" (jusqu'en 1527).
Selon l'état actuel de nos connaissances, les tribunaux d'Empire ne jouèrent pas un grand rôle en Suisse. Dès le XIVe s., les cantons bénéficièrent généralement d'exemptions, qui furent régulièrement renouvelées (avec des réserves). Il en résulta que des cantons comme Berne et Zurich se sentirent dispensés de la juridiction des tribunaux d'Empire après 1495, même si formellement ils en dépendaient encore. Certes, la paix de Bâle (1499) stipula que la Confédération et ses pays alliés ne pouvaient pas être cités devant la Chambre impériale pour les procès en cours, mais il n'y eut pas d'émancipation formelle et globale. Dans la pratique, les territoires entrés dans la Confédération avant 1499 échappèrent aux tribunaux d'Empire, tout comme les pays savoyards et, au début, autrichiens. En revanche, des procès furent intentés devant eux contre des cantons et alliés comme Appenzell, Bâle, Schaffhouse et Saint-Gall, c'est pourquoi la ville de Bâle tint à clarifier la situation. Il semble que l'on en ait appelé à la Chambre impériale surtout dans des affaires entre Confédérés et non-Confédérés qui avaient été jugées en première instance par un tribunal non confédéré. Sur le plan interne, la procédure d'arbitrage prévue par les pactes, qui s'était imposée vers 1450, excluait un recours auprès des tribunaux d'Empire. Lors de la paix de Westphalie (1648), les cantons confédérés obtinrent tous, à l'instigation de Bâle et de Schaffhouse, la pleine exemption; cela ne valait pas sans autre pour leurs alliés (comme Bienne, les Grisons ou le Valais), bien qu'ils fussent intégrés de facto à la Suisse. La partie nord de l'évêché de Bâle resta sous la juridiction des tribunaux d'Empire jusqu'à son occupation par la France en 1792, le Fricktal et la seigneurie de Tarasp jusqu'au recès de la Diète impériale de 1803.