L'Assemblée fédérale est «l'autorité suprême de la Confédération» selon la Constitution fédérale de 1848, «sous réserve des droits du peuple et des cantons» depuis la révision de 1874. Elue directement par le peuple et les cantons, qu'elle représente (représentation), elle occupe un rang supérieur à celui du Conseil fédéral et du Tribunal fédéral; en effet ces hautes autorités, dont elle élit les membres, agissent en vertu de la législation qu'elle adopte et sont soumises à sa surveillance. Le principe de la séparation des pouvoirs exige néanmoins que l'Assemblée ne s'immisce pas directement dans les domaines de compétence des autres autorités fédérales.
Bicamérisme (ou système des deux Chambres)
A la création de l'Etat fédéral (1848), l'organisation du Parlement donna lieu à de grands débats. Les uns souhaitaient une assemblée nationale unitaire, proportionnelle à la population. Les petits cantons y auraient été complètement minorisés. Les autres voulaient reconduire sous une nouvelle forme la Diète fédérale représentant les cantons, ce qui aurait empêché les radicaux, majoritaires surtout dans les grands cantons du Plateau, d'atteindre leurs buts. Après des luttes pénibles, on trouva un compromis en se ralliant au bicamérisme, sur le modèle des Etats-Unis. L'Assemblée fédérale se compose donc de deux Chambres: le Conseil national qui représente le peuple et le Conseil des Etats, successeur de la Diète et représentant des cantons. Les deux Conseils sont égaux: les décisions ne peuvent être prises qu'avec l'accord de l'un et de l'autre. Ils siègent séparément, sauf pour les affaires auxquelles un traitement en deux temps serait préjudiciable: élection des conseillères et conseillers fédéraux, du chancelier ou chancelière de la Confédération, des juges fédéraux et du général, par exemple.
Le Conseil national
En 1848 le Conseil national («grande Chambre», «Chambre basse») comptait, à raison d'un siège pour 20'000 habitants (Suisses et étrangers), 111 membres. Ce nombre s'agrandit au gré de la croissance démographique, jusqu'à ce qu'on le fixe à 200 en 1962. Les sièges sont répartis selon le dernier recensement, mais chaque canton ou demi-canton en a au moins un.
Contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays, ni le gouvernement ni le Parlement ne peuvent allonger ou raccourcir la durée de la législature, qui fut d'abord fixée à trois ans, et à quatre depuis 1931. Les élections ont toujours eu lieu, dès 1851, en octobre et le nouveau Conseil entre en fonction à la session d'hiver.
Les conseillers nationaux furent élus au système majoritaire jusqu'en 1917. La proportionnelle (systèmes électoraux) fut introduite en automne 1919. Du principe de la séparation des pouvoirs découlent les règles d'incompatibilité: nul ne peut être à la fois conseiller national et conseiller aux Etats, conseiller fédéral, juge fédéral, chancelier de la Confédération, général ou fonctionnaire fédéral. Signe de l'anticléricalisme du jeune Etat fédéral, les ecclésiastiques étaient exclus; cette exclusion ne sera abolie que dans la Constitution de 1999.
Le Conseil des Etats
Le Conseil des Etats («Chambre haute») compte 44 membres en 1848 et 46 depuis la création du canton du Jura, soit deux par canton (un par demi-canton). Au début, il ressemblait beaucoup à la Diète, si ce n'est que ses membres devaient voter sans instructions. Les conseillers et conseillères aux Etats («sénateurs», «sénatrices») sont nommés selon des règles cantonales, qui ont évolué en se rapprochant de celles valant pour le Conseil national: de l'élection pour un an par le Grand Conseil (cas le plus courant au début), on est passé à l'élection populaire (Berne l'adopta en dernier, en 1977) pour quatre ans (sans exception), organisée en même temps que celle du Conseil national (sauf Appenzell Rhodes-Intérieures), au système majoritaire (sauf dans les cantons du Jura et, depuis 2011, de Neuchâtel). Les incompatibilités sont depuis 2003 les mêmes qu'au Conseil national. Les ecclésiastiques et les fonctionnaires fédéraux pouvaient être admis, sauf disposition cantonale contraire, alors qu'ils étaient exclus du Conseil national (jusqu'en 1999).
Les différences de style entre les deux Chambres tiennent à la nature même du bicamérisme suisse. Le National est plus vivant, plus bruyant, mais plus anonyme. Il est plus ouvert aux idées nouvelles, qui émanent souvent de courants minoritaires. Conséquence du système proportionnel, il compte des représentants et représentantes de nombreux partis; les conseillers et conseillères forment selon leurs affinités des groupes parlementaires dont le rôle est important et où l'influence des partis est déterminante. Le Conseil des Etats en revanche connaît une ambiance plus calme. Ses travaux sont moins réglementés et il n'y a pas de groupes parlementaires. La plupart de ses membres appartiennent aux grands partis, mais les intérêts partisans s'effacent souvent devant la défense des intérêts régionaux.
Le Conseil des Etats a subi bien des attaques. Au début il lui était reproché d'être une réplique de la Diète honnie. La durée des mandats étant trop courte, les personnalités de valeur préféraient siéger au National, qui avait généralement la primeur des affaires importantes. Plus tard l'image s'est inversée. L'élection populaire au système majoritaire et l'allongement des mandats ont fait du Conseil des Etats un cénacle respecté qui, plus homogène que le National, exerce de fait une plus grande influence (par exemple dans la procédure en cas de divergences). Plusieurs conseillers et conseillères nationaux souhaitent couronner leur carrière par une élection aux Etats. Récemment, de nouvelles critiques sont apparues contre le Conseil des Etats, où la population urbaine serait gravement sous-représentée; mais les propositions de réforme, qui vont d'une nouvelle pondération des cantons jusqu'à l'abolition de la Chambre haute, n'ont abouti à rien jusqu'à maintenant. Le compromis de 1848, qui fonde l'Etat fédéral sur l'égalité des citoyens et des cantons, a gardé sa validité.
Représentation et intérêts
Si elle représente la population et ses divers intérêts politiques, sociaux et régionaux, l'Assemblée fédérale n'en est cependant pas un exact reflet. En effet, le «portrait robot» du conseiller montre un quinquagénaire de sexe masculin, universitaire (juriste en général), disposant d'un revenu supérieur à la moyenne (250'000 francs par an en 1996). Nombreux sont, parmi les parlementaires, les membres de gouvernements cantonaux, au XIXe siècle les propriétaires et entrepreneurs, au XXe les paysans et les fonctionnaires d'associations. Rares sont les moins de 40 ans (sauf au début, où ils occupaient 38% des sièges), les ouvriers, les employés et les femmes. En 1971, après l'introduction du suffrage féminin sur le plan fédéral, 11 femmes (5,5%) entrèrent au National, une aux Etats (2,5%), chiffres passés à 50 (25%) et 11 (23,9%) en 2003.
L'introduction de la proportionnelle en 1919 a été la principale césure dans l'histoire du Conseil national. Alors que les radicaux (radicalisme, libéralisme) dominaient jusqu'à cette date, on trouve ensuite trois grands partis de force plus ou moins égale (Parti socialiste, PS; Parti radical-démocratique, PRD; Parti démocrate-chrétien, PDC) et un quatrième de taille moyenne (Union démocratique du centre, UDC). Mais ce dernier progressa au cours des années 1990, aux dépens du PRD, du PDC et, en 1999, des petits partis de droite; il devint même en 2003 le groupe le plus nombreux. Le système électoral majoritaire explique la composition différente du Conseil des Etats, où dominent les radicaux et les conservateurs catholiques (devenus les conservateurs populaires puis les démocrates-chrétiens), selon un rapport de force stable.
Au moment du vote, l'orientation partisane et l'appartenance à un groupe s'effacent parfois devant la défense d'intérêts régionaux, économiques ou sociaux particuliers. Cette remarque s'applique au Conseil des Etats jusqu'à nos jours, et au National avant l'introduction de la proportionnelle, laquelle n'a pas cependant provoqué, comme dans d'autres démocraties parlementaires, la formation de coalitions fixes. Les alliances varient de cas en cas et il n'est pas rare qu'un groupe soit divisé (démocratie de concordance). Les trois grands groupes bourgeois se retrouvent généralement dans l'alliance victorieuse. Cependant la gauche, quoique minoritaire, n'est pas toujours perdante (notamment depuis 1959, date de l'adoption de la formule magique).
Le rôle de l'Assemblée fédérale au cours du temps
Le rôle et l'influence de l'Assemblée fédérale ont varié, dans les grandes lignes, en fonction de facteurs comme le développement des droits politiques, le poids des groupes de pression (groupements parlementaires, fédérations), l'activité de l'administration fédérale. Dans les premières années, on peut encore parler d'un vrai pouvoir parlementaire, limité certes aux compétences alors très restreintes de la Confédération. Les intérêts étaient directement représentés par les membres de l'Assemblée, le peuple ne pouvait intervenir ni par initiative populaire ni par référendum populaire.
Mais le mouvement démocratique s'éleva contre la prépondérance de la grande bourgeoisie libérale et radicale et parvint à imposer, de concert avec l'opposition conservatrice catholique, les droits de référendum législatif facultatif en 1874 et d'initiative populaire (qui permet de réviser partiellement la Constitution) en 1891. Ces droits plaçaient les travaux de l'Assemblée sous la menace d'un blocage au cas où les intérêts de groupes capables de lancer un référendum auraient été négligés. Ainsi armés, les groupes de pression s'organisèrent de mieux en mieux, ils firent élire à l'Assemblée fédérale leurs représentants ou placèrent des parlementaires à la tête des grandes associations et entreprises. En même temps le Conseil fédéral, chargé de tâches toujours plus nombreuses, développait son administration. Un nouveau champ d'action s'ouvrait ainsi aux groupes de pression, qui pouvaient, lors de la procédure de consultation, influencer les projets de loi avant qu'ils n'arrivent devant les Chambres. Celles-ci, affaiblies, dépourvues d'infrastructures propres, restèrent comme en 1848 un parlement de notables, à peine défrayés. Dans la première moitié du XXe siècle, le rôle de l'Assemblée se réduisit encore, du fait que durant les deux guerres mondiales de très larges compétences furent transférées au Conseil fédéral, en vertu des pleins pouvoirs. En outre, l'esprit autoritaire et antiparlementaire qui régnait en Europe eut des répercussions en Suisse.
Une tendance contraire se fit jour dans les années 1960, à la suite de l'affaire des Mirages (1964) et se confirma lors de l'affaire des fiches (1988-1989, protection de l'Etat): ces scandales mirent en évidence les conséquences d'un contrôle parlementaire insuffisant (que l'on renforça donc). La dispersion croissante des intérêts rendit plus difficile la conclusion d'accords entre groupes de pression d'une part, Conseil fédéral et administration de l'autre. Aussi l'Assemblée fédérale reprit, vers la fin du XXe siècle, un rôle plus actif dans les processus législatifs. Les projets du Conseil fédéral subissent plus d'amendements qu'autrefois, il n'est pas rare qu'ils soient bouleversés de fond en comble. Comme au milieu du XIXe siècle, il arrive que les Chambres élaborent une loi presque sans l'aide du Conseil fédéral (loi sur la TVA par exemple). Cette évolution s'appuie sur la redécouverte dès 1963 de l'initiative parlementaire (interventions parlementaires), sur l'organisation dès 1966 des services du Parlement, sur la création en 1991 de commissions parlementaires permanentes, qui accomplissent un travail de professionnels et sur la définition plus précise des droits et tâches des parlementaires par la Constitution fédérale de 1999 et par la loi de 2002 sur le Parlement.
Compétences
En matière constitutionnelle ― domaine qui relève dès 1848 du peuple et des cantons ―, les Chambres ont la compétence de formuler un projet de révision totale ou partielle. A propos des initiatives populaires (droit introduit en 1891), elles doivent, si le texte est présenté sous la forme d'un projet de révision partielle «rédigé de toutes pièces», se limiter à une recommandation de vote, éventuellement à l'élaboration d'un contre-projet.
L'Assemblée fédérale a des compétences législatives (lois). Formellement, une loi fédérale est l'œuvre du législateur, formé en Suisse, depuis 1874, des Chambres et du peuple, lequel donne son avis, s'il y a référendum, ou son approbation tacite. Une loi doit contenir ses principes généraux d'application. Quant aux détails réglés dans des ordonnances, l'Assemblée peut les édicter elle-même ou s'en remettre au Conseil fédéral. La Constitution de 1999 clarifie la terminologie relative aux actes de l'Assemblée, en renonçant au terme d'«arrêté fédéral de portée générale» qui pouvait, selon le cas, être soumis au référendum (loi de durée limitée) ou ne pas l'être (ordonnance). Cette notion, établie en 1962, n'était guère dans l'esprit de la Constitution de 1874, qui voulait soumettre au référendum jusqu'aux actes administratifs importants.
L'Assemblée fédérale a toujours revendiqué certaines compétences d'ordre administratif (administration), qui relèvent plutôt, en vertu de la séparation des pouvoirs, de l'exécutif. Mais pour la démocratie helvétique, les actes administratifs importants, que la Constitution de 1999 appelle «arrêtés fédéraux», ceux qui touchent un grand nombre de citoyens et citoyennes ou qui ont une portée financière notable, méritent une légitimation plus haute, conférée par l'Assemblée, voire par le peuple (par exemple la construction d'une autoroute, un grand chantier ferroviaire, une concession pour centrale atomique).
En outre, l'Assemblée prend part à la gestion de l'Etat en nommant les membres de ses plus hauts organes et en contribuant aux activités de planification générale. Le Conseil fédéral lui soumet depuis 1968 un rapport sur les Grandes lignes de la politique gouvernementale (Rapport sur le Programme de la législature dès 1986, puis Message sur le programme de la législature à partir de 2007), dont elle se bornait à prendre connaissance jusqu'en 2003. Depuis lors, elle prend position sur ce programme, sous la forme d'un arrêté fédéral.
La Constitution de 1848 plaçait la politique étrangère sous la responsabilité conjointe de l'Assemblée et du Conseil fédéral. Mais dès le début du XXe siècle, ce dernier revendiqua de plus en plus l'exclusivité de ce domaine. Les Chambres avaient pour rôle d'approuver les traités, non de les élaborer. Cependant la législation internationale a fini par prendre un tel poids que l'Assemblée risquait de perdre beaucoup de son pouvoir. C'est pourquoi elle fut associée plus étroitement à la politique étrangère dès l'ouverture du débat sur l'adhésion de la Suisse à l'Espace économique européen (EEE); ses droits furent renforcés en 1991 et en 2002. Le Conseil fédéral est désormais obligé de consulter les commissions de politique extérieure avant de fixer les grandes lignes des mandats de négociation avec les organisations internationales.
L'Assemblée a seule la compétence, qu'elle n'a pas eu à exercer, de déclarer la guerre et de conclure la paix. Elle partage le droit de disposer de l'armée (lors d'une mobilisation par exemple), la responsabilité des exécutions et des interventions fédérales et celle des mesures pour la sûreté extérieure et intérieure (politique de sécurité) avec le Conseil fédéral, qui s'est avéré dans la pratique plus apte à prendre de telles décisions urgentes. En outre, les Chambres ont le droit d'amnistie et exercent en séance commune le droit de grâce.
Les attributions financières de l'Assemblée fédérale comprennent l'établissement (en décembre) du budget annuel et de ses éventuelles annexes, où doivent figurer toutes les dépenses de la Confédération (finances publiques). La marge de manœuvre est étroite, car une grande partie des charges dépend de dispositions légales et d'engagements antérieurs. Les comptes de l'Etat sont approuvés lors de la session d'été, après un examen qui est l'un des moyens propres à exercer la haute surveillance sur le Conseil fédéral et l'administration. La délégation des Finances (commune aux deux Conseils) a, depuis 1903, de larges compétences en fait de contrôle durant l'exercice budgétaire en cours.
Le Conseil fédéral présente un rapport de gestion, qui est examiné durant la session d'été. Il existe d'autre part, depuis les années 1960, des commissions de gestion permanentes. L'Assemblée ne peut, dans l'immédiat, ni modifier ni casser les décisions et ordonnances des autorités soumises à son contrôle, mais elle peut en changer les bases légales et atteindre ainsi son but. La portée juridique donnée dès 2002 à la motion montre clairement que l'Assemblée peut intervenir de manière contraignante dans le domaine de compétences du Conseil fédéral; antérieurement, ce point avait fait l'objet de longues controverses. Dans la pratique, l'effet politique des démarches de ce genre dépasse leur effet juridique formel. Une surveillance efficace suppose un droit d'enquête et d'information. Le Conseil fédéral a commencé, à la fin du XIXe siècle, à se réserver un domaine soustrait au contrôle des Chambres. Après les affaires des Mirages et des fiches, l'Assemblée a obtenu un droit de regard illimité, au moins pour de petites délégations parlementaires (commission d'enquête parlementaire, délégation des commissions de gestion).
L'Assemblée surveille aussi le Tribunal fédéral. Mais l'indépendance de la justice exige que ce contrôle se limite à la gestion administrative; il ne saurait porter sur l'activité juridique elle-même. La Constitution de 1848 confiait à l'Assemblée tous les recours des cantons et des citoyens contre des décisions du Conseil fédéral. Celle de 1874 et la législation ultérieure ont transféré toutes ces compétences au Tribunal fédéral.
Organisation, méthodes de travail
Les Conseils se réunirent pour la première fois le 6 novembre 1848. Le 27 du même mois ils désignèrent Berne comme ville fédérale. Le Conseil national siégea jusqu'en 1858 à l'ancien Casino (à l'emplacement de l'actuel Palais du Parlement) ou dans la salle du Grand Conseil de l'hôtel de ville de Berne, le Conseil des Etats à l'hôtel de ville de l'Äusserer Stand, à la Zeughausgasse. Ils occupèrent ensuite au Palais fédéral les deux ailes latérales ouest et dès 1902 les salles actuelles.
Les deux Conseils siègent normalement aux mêmes dates. Il n'y avait au début qu'une seule session ordinaire, en juillet, qui s'avéra d'emblée insuffisante. Les débats, ajournés au bout de trois ou quatre semaines, reprenaient lors d'une à trois sessions supplémentaires. Dès 1908, quatre sessions ordinaires ont lieu en décembre, mars, juin et septembre; elles durent normalement trois semaines, mais peuvent se prolonger sous forme de sessions spéciales d'une semaine (décidées par les bureaux des Conseils). En outre, des sessions extraordinaires peuvent avoir lieu à la demande du Conseil fédéral (par exemple au début des deux guerres mondiales), d'un quart des conseillers nationaux (1891, 1985, 1986, 1998) ou de cinq cantons (ce qui ne s'est jamais produit; la Constitution de 1999 leur substitue un quart des conseillers aux Etats). Le bureau de chaque Conseil prépare le programme des sessions.
Un président ou une présidente est élue pour une année dans chaque Chambre. Celui ou celle du National, premier personnage de l'Etat selon le protocole, préside aussi l'Assemblée quand les Chambres siègent ensemble. La présidence est assistée par une vice-présidence et par les bureaux, auxquels appartiennent les scrutateurs et scrutatrices et, au National, les présidents ou présidentes de groupes.
La Constitution exige la présence de la majorité absolue des membres, condition qui, en fait, est loin d'être toujours remplie. Les séances sont publiques, sauf très rares exceptions. Elles sont publiées, partiellement dès 1891, intégralement dès 1971, dans le Bulletin sténographique, devenu Bulletin officiel.
Les délibérations portent principalement sur les projets de lois et d'arrêtés présentés par le Conseil fédéral ou par une commission parlementaire, qui donnent lieu à un débat d'entrée en matière, suivi d'un examen de détail et d'un vote d'ensemble. Les Chambres se penchent aussi sur des rapports du Conseil fédéral et des commissions parlementaires, sur des interventions parlementaires, initiatives cantonales, pétitions, déclarations du gouvernement, motions d'ordre, et procèdent à des élections (par exemple du Conseil fédéral). La plupart des objets sont examinés préalablement en commission. Chaque conseiller et conseillère a le droit de présenter des propositions. Cependant, le temps de parole des conseillers et conseillères nationaux est limité, de même que le nombre d'orateurs et oratrices par groupe, et les «questions ordinaires» se traitent par écrit.
Les décisions se prennent à la majorité simple, mais la clause d'urgence (qui permet l'entrée en vigueur immédiate d'une loi), certaines décisions financières («frein aux dépenses» de 1951 à 1958 et dès 1995) et certains arrêtés découlant des prescriptions sur le «frein à l'endettement» (dès 2002) exigent la majorité absolue de tous les membres de chacun des Conseils. Le vote par appel nominal était déjà prévu dans le premier règlement de la Chambre basse. Cette procédure fastidieuse, de plus en plus fréquemment demandée, a fait place au National, en 1993, au vote électronique.
Puisque les décisions doivent obtenir l'aval des deux Conseils, il est nécessaire d'établir quelques règles de procédure. Les présidents et présidentes des Chambres décident quel Conseil traitera telle affaire en premier. Un objet ne passe pas devant les deux Conseils lors de la même session, sauf en cas d'urgence et sur décision de la conférence de coordination formée des bureaux des deux Conseils. Les projets vont et viennent entre les Conseils jusqu'à concordance de vues (qui seule permet leur adoption). Une conférence de conciliation (créée en 1902) intervient, dès 1991, s'il subsiste des divergences après trois délibérations dans chaque Conseil. Dans le cas de décisions soumises au référendum, une fois les divergences aplanies, la commission de rédaction peaufine le texte et un vote final a lieu dans chaque Conseil.
Statut juridique des parlementaires, indemnités, infrastructure à disposition
Tout membre du Parlement a quelques privilèges qui lui permettent d'exercer son mandat sans entraves. Il jouit d'une immunité absolue pour ses votes (il ne peut être attaqué en justice en raison d'un vote exprimé en Conseil ou en commission). Pour les autres attaques relatives à ses activités officielles, il est protégé par une immunité relative, qui ne peut être levée que par l'Assemblée (le cas est fort rare). Sa participation aux sessions est garantie, en ce sens qu'il ne peut faire l'objet d'aucune poursuite pénale durant une session sans son accord ou celui de ses collègues.
Il reçoit depuis 1848 une indemnité, qui consiste d'abord en jetons de présence (14 fr. par jour en 1848, 400 fr. en 2003) et en dédommagements divers. A cela s'ajoute, depuis 1972, un forfait annuel (24'000 fr. en 2003) et une indemnité de prévoyance (5933 fr. en 2003). Soit au total, en 2003, environ 70'000 fr. de revenu annuel imposable, en moyenne (jetons de présence et forfait annuel, sans les dédommagements). Les groupes, subventionnés depuis 1972, se partagent 4,9 millions en 2003. Ces indemnités ont un double but. D'une part, elles devraient correspondre aux frais de fonction réels et assurer une certaine égalité des chances entre citoyens et citoyennes éligibles (droit de vote et d'éligibilité). D'autre part l'Assemblée fédérale ne doit pas devenir un parlement professionnel. Grâce au système de milice, les conseillers et conseillères apportent l'expérience de leur métier et restent plus proches des citoyens et citoyennes. Mais cela est de plus en plus difficile, car la tâche de membre du Parlement est de plus en plus absorbante: elle occupait en 2001, en moyenne, 56% de son temps de travail. C'est pourquoi 83% des parlementaires réduisaient leur activité professionnelle antérieure; 47% devaient constater une diminution de leur revenu total. L'Assemblée fédérale est devenue en fait un parlement semi-professionnel. Néanmoins, des propositions visant à indemniser plus généreusement ses membres ont été très clairement rejetées par le peuple en 1962 et 1992.
Les infrastructures de l'Assemblée sont elles aussi modestes. La Chancellerie fédérale fut conçue à l'origine comme un état-major commun à l'Assemblée et au Conseil fédéral, mais celui-ci la mit de plus en plus à son service. Un secrétariat de l'Assemblée fédérale se développa très lentement; il se sépara de la Chancellerie en 1972, prit le nom de Services du Parlement et fut placé sous la dépendance directe de l'Assemblée et de ses organes (182 postes en 2003). Cependant, pour accomplir ses tâches, l'Assemblée peut continuer de recourir aux services de l'administration générale.
Sources et bibliographie
- Gruner, Erich (éd.): L'Assemblée fédérale suisse 1848-1920, 2 vol., 1966.
- Düblin, Jürg: Die Anfänge der Schweizerischen Bundesversammlung. Untersuchungen zur politischen Praxis der eidgenössischen Räte in den zwei ersten Legislaturperioden (1848-1854), 1978.
- Services du Parlement (éd.): Le Parlement – «Autorité suprême de la Confédération»? Mélanges sur l'Assemblée fédérale à l'occasion du 700e anniversaire de la Confédération, 1991.
- Aubert, Jean-François: L'Assemblée fédérale suisse, 1848-1998, 1998 (avec bibliographie).
- Jegher, Annina: Bundesversammlung und Gesetzgebung. Der Einfluss von institutionellen, politischen und inhaltlichen Faktoren auf die Gesetzgebungstätigkeit der Eidgenössischen Räte, 1999.
- Wyss, Moritz von: Maximen und Prinzipien des parlamentarischen Verfahrens. Eine Untersuchung über die Schweizerische Bundesversammlung, 2001.
Contexte | Chambres fédérales, Conseil des Etats, Conseil national |