Le référendum est une procédure constitutionnelle qui permet aux citoyens (c'est-à-dire au peuple, d'où le qualificatif de "populaire") de voter a posteriori sur des décisions prises par les organes étatiques ou sur des questions qui leur sont soumises par ceux-ci (Votations). En Suisse, où le terme revêt une signification plus large, qui englobe la procédure conduisant à la votation, par exemple la récolte de signatures, il existe au niveau fédéral, cantonal et communal. Il est connu aussi dans d'autres pays européens et aux Etats-Unis.
A l'époque de l'ancienne Confédération, on entendait par référendum la ratification des recès de la Diète par les instances cantonales (Diète fédérale) ou l'approbation des décisions de la Diète des Ligues grises par les juridictions (l'entrée en vigueur requérant d'abord une majorité dans deux ligues, puis la majorité de toutes les juridictions. Ce règlement resta en vigueur jusqu'en 1854).
Le référendum moderne fait partie des droits politiques et des droits populaires, qui constituent le noyau de la démocratie directe. Au niveau de la Confédération et des cantons (sauf Vaud et Nidwald), seules sont attaquables les décisions d'un parlement, mais au niveau communal, on peut contester aussi celles d'une assemblée délibérante ou d'un exécutif. Il peut s'agir de dispositions constitutionnelles ou de lois, voire, dans certains cantons et communes, d'arrêtés financiers, d'ordonnances, de règlements, de projets concrets.
Depuis 1848, les révisions partielles ou totales de la Constitution fédérale sont obligatoirement soumises au référendum. Les initiatives populaires sont donc répertoriées comme des référendums obligatoires par la Chancellerie fédérale (elles représentent la majorité des cas). Depuis 1874, les lois fédérales et certains arrêtés fédéraux peuvent faire l'objet d'un référendum facultatif, dans un délai de trois mois après leur adoption, à la demande d'un nombre déterminé de cantons ou de citoyens. Le chiffre de 30 000 signatures, fixé en 1874 (soit environ 5% des personnes ayant alors le droit de vote) fut porté en 1978 à 50 000 (1,3%). Huit cantons peuvent également demander une votation populaire. Cinq cas sont connus; quatre n'aboutirent pas ou échouèrent en votation (loi sur l'émission des billets de banque en 1876, révision du Code pénal en 1982, droit international privé en 1988, protection des eaux en 1992), mais en 2003, le référendum lancé par onze cantons contre le paquet fiscal fut un succès. Le Parlement peut aussi de son propre chef soumettre certaines décisions au peuple.
L'introduction du référendum financier échoua à plusieurs reprises au niveau fédéral. Egalement vains furent les efforts visant à soumettre au référendum d'autres types de décisions administratives, par exemple l'octroi de concessions hydrauliques en 1956, l'équipement en armes atomiques en 1963, les dépenses d'armement en 1952 et 1987, la construction des routes nationales en 1978 et la construction de centrales nucléaires en 1979 et 1984. Les citoyens refusèrent en 2000 le référendum constructif, demandé par voie d'initiative populaire et qui aurait permis une votation sur un contre-projet à une loi fédérale. Au niveau cantonal en revanche (Constitutions cantonales), il existe de nombreux types de référendums administratifs, en matière de finances, (portant la plupart du temps sur les dépenses ou sur la détermination de l'assiette fiscale), de planification, d'octroi de concessions ou, fondamentalement, sur toutes les décisions parlementaires (Soleure).
Le domaine originel du référendum populaire fut élargi, au niveau fédéral, en quatre étapes: furent soumis au référendum les traités internationaux conclus pour une durée indéterminée et non dénonçables en 1921, les arrêtés fédéraux urgents en 1949, l'adhésion à des organisations de sécurité collective (par exemple l'ONU) ou à des communautés supranationales en 1977 ainsi que, en 2003, les traités internationaux qui contiennent des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en œuvre exige l'adoption de lois fédérales. Des votations eurent aussi lieu, malgré l'absence de bases constitutionnelles claires, sur des objets comme l'accord de libre-échange entre la CEE et l'AELE en 1972, l'adhésion à la Société des Nations en 1920 et celle à l'Espace économique européen en 1992 (dans ces deux derniers cas, le Conseil fédéral et le Parlement recoururent à une astuce, en couplant les objets en discussion à un changement constitutionnel qui nécessitait un référendum obligatoire). Le référendum obligatoire sur les traités internationaux fut appliqué en 1986 lors de l'adhésion à l'ONU, le référendum facultatif en 1923 à propos des zones franches de la Haute-Savoie et du Pays de Gex, en 1958 sur l'utilisation de la force hydraulique du Spöl, en 1976 sur le prêt à l'Association internationale de développement, en 1992 sur l'adhésion au Fonds monétaire international et, en 2000, 2005 et 2009, sur les accords bilatéraux avec l'UE. La fondation du canton du Jura, nécessitant un changement de la Constitution fédérale, entraîna un référendum obligatoire. La Constitution de 1999 (art. 53) prescrit expressément un référendum pour toute modification du nombre ou du statut des cantons, mais se contente de l'approbation de l'Assemblée fédérale, sous la forme d'un arrêté fédéral, pour les modifications du territoire d'un canton, que la pratique antérieure soumettait au référendum (cas du Laufonnais en 1993, de Vellerat en 1996).
Le référendum constitutionnel, repris de modèles français (Constitution montagnarde de 1793 et Constitution du Directoire de 1795), fut appliqué pour la première fois en 1802, à l'occasion de la votation sur la deuxième Constitution helvétique. Il disparut ensuite pour presque trois décennies. Plusieurs cantons l'adoptèrent à l'époque de la Régénération, à commencer par le Tessin en 1830, les autres y furent conduits par la Constitution fédérale de 1848. Entre 1831 et 1852, six cantons introduisirent différentes formes du veto populaire, également inspiré de la Constitution montagnarde et permettant de contester a posteriori une décision législative. Mais, à cause des trop nombreux obstacles à vaincre (les abstentionnistes étaient comptés selon les cantons parmi les rejetants ou les acceptants, afin d'atteindre la majorité absolue), le veto déboucha rarement sur un succès. Le référendum législatif obligatoire fut introduit d'abord par le Valais en 1844 (jusqu'en 1848), les Grisons en 1854 et Bâle-Campagne en 1863. Vaud adopta en 1845 le référendum législatif facultatif, mais aucun canton ne le suivit, dans un premier temps. Le veto évolua vers le référendum facultatif dans quelques cantons (Soleure en 1856, Saint-Gall en 1861). Lucerne, en 1863, et Schaffhouse, en 1865, rendirent son dépôt plus aisé. Le mouvement démocratique favorisa à la fin des années 1860 la généralisation du référendum législatif, qui fut introduit dans les constitutions de Thurgovie, Zurich, Berne et Lucerne en 1869. Vers la fin du XIXe s., il était présent dans tous les cantons, sauf Fribourg, qui ne l'adopta qu'en 1921. Vers 2000, douze cantons connaissaient un référendum législatif obligatoire et treize un référendum législatif facultatif; tous possédaient le référendum financier (Vaud sous une forme restreinte) et treize un référendum administratif. Le référendum communal fut introduit par les villes de Berne en 1882, Neuchâtel en 1888, Zurich en 1891, Bienne en 1892, Genève en 1895, Coire en 1904, Saint-Gall en 1909, Lucerne en 1915, Schaffhouse en 1918 et Lausanne en 1921.
Les conservateurs, qui imposèrent le référendum dans plusieurs cantons, utilisèrent avec efficacité cet instrument au niveau fédéral après 1874. Ils lancèrent ainsi en 1884 un référendum contre quatre projets en même temps ("le chameau à quatre bosses"). Mais le principe de l'unité de la matière prévalut dès 1891. Dans les cantons, le référendum obligatoire, qui engendrait un nombre inutilement élevé de votations, fut progressivement remplacé par le référendum facultatif.
Le référendum est souvent considéré comme un frein, qui contraint au compromis et rend impossible une politique de majorité. Pour l'éviter, il faut que toutes les forces susceptibles de le lancer avec succès soient le plus possible intégrées dans les processus décisionnels (Procédure de consultation). La phase préparlementaire du travail législatif devint ainsi prépondérante. Le référendum déploie ses effets même s'il n'est pas lancé. Dès la fin du XIXe s., il encouragea la formation d'alliances. Il convient toutefois de préciser que l'organisation des groupes d'intérêts (Fédérations) connut ses plus grands progrès en des temps où le référendum avait été mis largement hors jeu (périodes de guerre ou d'immédiat après-guerre). Les études sur le néocorporatisme ont d'ailleurs montré des cas où la démocratie basée sur la négociation entre les différents groupes d'intérêts s'est développée à l'étranger plus tôt et plus profondément qu'en Suisse; le référendum serait donc moins la cause de l'influence des groupes d'intérêts que son instrument. On a aussi relevé qu'une participation constructive présuppose un niveau d'information équivalent. Pour ses critiques, le référendum apparaît comme un moyen de défense contre toutes les mesures politiques qui ne correspondent plus aux convictions des citoyens.