On appelle structures agraires le cadre institutionnel (et en particulier sa mise en forme juridique) au sein duque se pratique l'agriculture, dans une société donnée. Les principaux éléments à considérer sont, selon les lieux et les époques, la propriété, les droits seigneuriaux, les droits d'usage sur les surfaces agricoles et les forêts, ainsi que l'organisation et la réglementation de l'exploitation collective ou individuelle. Dans la société rurale traditionnelle, les structures agraires marquaient l'ensemble de l'ordre juridique, social et économique.
Epoque romaine
Les structures agraires de la Suisse romaine sont très difficiles à saisir, pour plusieurs raisons. Le territoire national actuel ne formait pas une unité administrative, mais relevait de quatre provinces juridiquement très différentes. Nous n'avons pas non plus une idée claire de l'extension exacte des trois colonies ni de leurs rapports avec les cités (Civitas) de pérégrins qui existaient assurément à leurs côtés. Les sources écrites, épigraphiques et iconographiques manquent presque complètement.
On pourrait essayer d'extrapoler à partir d'observations et de témoignages relatifs à des régions voisines appartenant aussi à ces quatre provinces. Mais le procédé est risqué, la configuration topographique particulière de la Suisse rendant pratiquement impossible tout raisonnement par analogie sur les structures agraires dans les Alpes, dans les zones forestières du Plateau (Napf) et sur les hauteurs du Jura.
Lors de l'établissement de la domination romaine, c'est-à-dire lors de la création des provinces, les indigènes, libres mais ne jouissant pas du droit de cité romain, reçurent le statut de peregrini (étrangers) qui les obligeait à vivre sur leurs terres ancestrales. Quant aux membres de l'ancienne élite gauloise, il est tout à fait possible, mais non prouvé, qu'ils aient vu leurs biens passer directement, sans changement de propriétaire, sous l'empire du droit romain, en même temps qu'ils obtenaient le droit de cité. On a des indices d'une telle évolution dans le canton de Genève (villa du Parc de la Grange).
Le fait que deux des colonies situées sur le futur territoire suisse (Augusta Raurica et Aventicum) soient officiellement qualifiées d'emerita indique qu'elles accueillirent des vétérans qui y reçurent des terres. Il en va de même pour la Colonia Iulia Equestris, dont le nom évoque la présence de militaires.
La cadastration et la division du sol (délimitation et centuriation) pourraient avoir été réalisées dans notre pays selon le modèle utilisé dans d'autres provinces (notamment dans la vallée du Rhône), avec établissement de plans et d'actes écrits. Cependant, la recherche de réseaux de centuriation n'a pas abouti à des résultats assurés et, dans de nombreux endroits, le relief montagneux aurait rendu de toute manière impossible une telle cadastration.
Il existait une couche de riches propriétaires fonciers. Sa présence ressort du fait que la noblesse municipale des colonies et des civitates était soumise au cens (évaluation de la fortune): pour être reçu dans la classe dirigeante locale (ordo decurionum), il fallait disposer d'une certaine fortune, variable selon le lieu; or celle-ci consistait principalement en terres.
La preuve d'une certaine fortune était de même exigée, dans tout l'Empire, pour être admis dans les deux ordres supérieurs, celui des chevaliers (equites) et celui des sénateurs. La présence de tels personnages est attestée en Suisse par des inscriptions. Il se pourrait que, dans ce cas aussi, le capital requis (census) ait correspondu à de vastes propriétés foncières.
Faute de sources, nous ignorons comment ces riches propriétaires exploitaient leurs biens. Nous ne savons pas si les maisonnettes fréquemment retrouvées dans la pars rustica des grandes villae servaient de logis à des fermiers, à des paysans libres, à des journaliers, voire à des esclaves. Un fragment d'inscription en mosaïque de la villa de Laufenburg (Bade) semble évoquer une relation clientélaire.
Moyen Age et époque moderne
Au haut Moyen Age, on constate que certaines villae romaines continuent d'être, en partie du moins, occupées et exploitées (par exemple à Bioggio, Dietikon, Munzach, Vandœuvres). Nombre d'entre elles, surtout au sud, à l'ouest et au nord-ouest de la Suisse, pourraient être devenues des domaines seigneuriaux; cependant, les indices corroborant cette hypothèse sont rares. Sous les Carolingiens, l'organisation économique et sociale des domaines, qu'ils appartiennent au roi (comme Stammheim), à un seigneur laïque ou à un seigneur ecclésiastique (abbayes de Saint-Gall, de Saint-Maurice), se fondait sans doute sur le système d'exploitation bipartite appelé régime domanial ou villication, appliqué dans le cadre de la seigneurie foncière. Celle-ci se composait d'une part de la cour domaniale ou réserve seigneuriale, cultivée par des serfs soumis aux corvées; d'autre part de plusieurs manses (en Suisse alémanique parfois divisés, dès le XIIe s., en Schuppose) concédés à des paysans contre un cens (en nature, en travail, en argent). Les premières mentions relatives au versement obligatoire de la dîme en faveur de l'Eglise datent du VIIIe s. Les lois barbares (germaniques) sont riches en prescriptions sur l'ordre seigneurial, juridique et social, mais peu loquaces sur les aspects économiques, qui restent très mal connus. Les localités rurales du haut Moyen Age étaient des groupes de fermes au plan lâche, comme le montre l'étude archéologique de celles d'entre elles qui ont été abandonnées. On pratiquait une agriculture de subsistance, peu spécialisée, qui n'exigeait sans doute pas une organisation collective poussée. Certaines sources plus tardives permettent de conclure à la présence dans les Préalpes et les Alpes de montagnards non soumis au régime domanial, parfois nomadisants, vivant d'une combinaison de céréaliculture à petite échelle et d'économie sylvo-pastorale.
Le Moyen Age classique connut un climat favorable et un essor démographique qui se traduisit par des défrichements, une densification des localités qui devinrent des villages et une progression de la céréaliculture. L'assolement apparut à cette époque. Nombre d'évêchés (en particulier Bâle, Sion et Côme) et d'abbayes (comme Einsiedeln, Engelberg, Muri ou Disentis), ainsi que des nobles étendirent notablement leurs terres et leurs droits, souvent en cherchant à former des territoires d'un seul tenant susceptibles d'une administration renforcée (instauration des bailliages). Tout en accroissant leurs propriétés, les seigneurs fonciers et territoriaux s'efforcèrent d'imposer à leurs dépendants une organisation sociale et économique qui certes fit naître des divergences entre eux et la paysannerie, mais qui reflétait aussi des intérêts communs. Sur le Plateau suisse tout particulièrement, la seigneurie foncière devint un élément de base à la fois des structures agraires médiévales et de la société féodale. Les cisterciens et d'autres ordres monastiques réformés organisèrent de façon particulièrement efficace, aux XIIe et XIIIe s., la culture de leurs terres. La base de la seigneurie foncière du Moyen Age classique était encore souvent la réserve seigneuriale, autour de laquelle gravitaient des groupes décentralisés d'exploitants corvéables, soumis au droit des tenanciers, dont les premiers textes connus remontent à cette époque. S'y ajoutaient les granges des ordres réformés, exploitées en partie directement, enfin les tenures agricoles et artisanales. Les relations entre seigneur et paysans avaient de multiples aspects, qui se reflètent dans la diversité des redevances féodales, dont les plus lucratives étaient les cens, les amendes, la mainmorte et les lods. Il existait néanmoins dans les Alpes et les Préalpes, voire sur le Plateau, des zones où la seigneurie foncière et les institutions féodales étaient peu présentes. Des alleux paysans (terres "libres" soumises seulement aux redevances dues au titre de la seigneurie justicière et territoriale) sont attestés en divers endroits, parfois en forte concentration (juridictions autonomes en Argovie, Thurgovie, Appenzell).
A l'approche du bas Moyen Age, les seigneurs commencèrent à abandonner l'exploitation directe de la réserve pour se contenter de percevoir la rente foncière. Les rapports complexes qu'ils entretenaient avec les paysans se réduisirent de plus en plus à une relation purement économique, l'encaissement des redevances. Les causes en furent d'une part l'essor des villes, aux alentours desquelles l'économie de subsistance fit place peu à peu à une production destinée aux marchés urbains et, d'autre part, le rendement médiocre, pour un coût administratif élevé, de l'exploitation directe, qui poussa les seigneurs à concéder toutes leurs terres (la réserve comme les manses) contre un cens fixe. Au sud du Tessin, ce processus conduisit dès le XIIe/XIIIe s. à l'apparition de la massaria (ou masseria), système de fermage liant une institution ecclésiastique ou un noble résidant en ville à des massari (fermiers, de mansionarius, détenteur d'un manse) pratiquant l'exploitation familiale. Avec le recul général du régime domanial, les relations verticales (avec le seigneur) cédèrent le pas aux relations horizontales (entre tenanciers). Le cadre de référence, pour la population rurale, ne fut plus la familia" de la seigneurie foncière, mais la communauté villageoise (Village) qui prit en main l'organisation de la production agricole (dans une évolution qui débuta précocement en Suisse romande et plus encore au Tessin) et imposa le système cultural (Systèmes culturaux). Ainsi se répandit sur le Plateau l'assolement triennal. La coexistence de jardins privés et de maraîchages pour les cultures spéciales, de soles (cultivées individuellement mais dans le cadre d'une organisation collective contraignante) et de biens communaux (objets d'une exploitation extensive collective, mais relativement libre jusqu'à la fin du bas Moyen Age) exigeait une réglementation (Coutumes locales). Dans les Alpes, l'essor de l'élevage favorisa les pâturages d'altitude et les systèmes de transhumance saisonnière à partir de localités situées en fond de vallée (Uri) ou en montagne (Valais). Ce processus d'intensification s'accompagna de conflits pour le contrôle des alpages (Marchenstreit, Conflits liés aux droits d'usage) opposant des communautés paysannes (par exemple à Uri, Schwytz ou Glaris) à leurs voisines ou à des abbayes (Einsiedeln, Engelberg).
La crise du bas Moyen Age (env. 1300-1450) ébranla les structures politiques, sociales et économiques de la société rurale. La multiplication des mauvaises récoltes, des épidémies et des dévastations dues à la guerre entraînèrent une forte mobilité géographique et sociale. Des serfs se mirent à échapper à l'autorité de leurs seigneurs, tant laïques (les Habsbourg par exemple) qu'ecclésiastiques, souvent en quittant la campagne. Les villes qui les accueillaient y gagnèrent en influence économique et politique, en particulier dans la Confédération. Elles se lancèrent alors dans un mouvement d'expansion territoriale qui dynamisa le marché foncier rural, car de nombreux citadins y investirent des capitaux, en achetant terres ou rentes (rentes constituées) et en concluant comme intermédiaires entre seigneurs fonciers et exploitants des contrats de fermage, de métayage et de bail à cheptel. Avant 1450, la tenure paysanne se caractérisait par des délais courts, un cens avantageux, une aide accordée par le seigneur en cas de reprise d'une ferme vacante et de fréquentes mutations de la structure foncière. Dans les Alpes, l'élevage de gros bétail destiné à l'exportation (Commerce de bétail) se développa dès le XIVe ou XVe s.; à Uri et Obwald, cette évolution alla de pair avec l'arrivée au pouvoir de nouveaux groupes dirigeants vers 1360-1380. Là où l'économie alpestre était organisée collectivement (forme qui se répandit au bas Moyen Age en Suisse centrale, alors que les fromageries familiales subsistaient dans les zones moins densément peuplées du Valais et des Grisons), elle était l'objet de règlements (Alpbrief, Droits d'alpage). Au Tessin, de nombreuses communes manquant d'alpages en achetaient ou en louaient à d'autres communes.
Vers le milieu du XVe s. (d'abord à l'ouest du Plateau, puis à l'est), les paysans se montrèrent de plus en plus intéressés à la transformation de toutes les formes de tenure en tenure héréditaire. Celle-ci leur offrait davantage de sécurité, car elle se confondait dans leur esprit avec la propriété, ce qui se traduisit par une augmentation des partages (dans l'esprit du partage réel prédominant dans le droit successoral paysan), des échanges et des ventes. En réaction, les seigneurs interdirent les partages et les ventes de tenures héréditaires. Afin d'éviter le morcellement de la propriété, la succession passait dans certaines régions au fils aîné (majorat, par exemple au Tessin), au fils cadet (minorat, dans l'Emmental) ou en indivis aux frères et sœurs (consortes) dirigés par l'aîné (comme dans le Bas-Valais). L'essor démographique qui commença vers 1450 et une exploitation plus intensive conduisirent à des conflits sur les ressources et à des tensions sociales. Les dispositions réglementaires et les sentances arbitrales concernèrent de plus en plus l'exploitation intensive des communaux où l'on se mit à clôturer des parcelles (Enclosures), et la surexploitation des forêts et des pâtures. Ce qui suscita des conflits au sein des villages et entre les communautés. Vers 1500, on voit aussi s'affirmer l'opposition socio-économique (qui se double souvent d'une inégalité d'accès aux droits d'usage) entre gros paysans et Tauner". A la fin du XVe s. apparaissent les premières tendances à limiter l'accueil d'immigrants pauvres parmi les communiers.
Aux XVIe et XVIIe s., les structures agraires ne subirent pas de modification profonde, mais plusieurs processus en cours se poursuivirent, voire se renforcèrent. La soumission aux cens et dîmes subsista, mais perdit de son importance face aux nouvelles forces sociales se manifestant dans l'Etat moderne, à savoir les communes, les acteurs du marché agricole et foncier, les détenteurs du capital. Les autorités étatiques en formation fixèrent les conditions-cadres de l'organisation économique et sociale au niveau communal, du droit successoral et du trafic des immeubles, des marchandises et des capitaux. Elles légitimèrent les limitations d'accès à la bourgeoisie, les enclosures et les partages de forêts, intervinrent dans les droits d'usage des villageois par leurs ordonnances forestières (coupes de bois limitées) et même directement dans le droit des paysans à disposer des terres qu'ils cultivaient (interdiction de partages et de changements d'affectation, règles successorales). Elles firent en outre reposer l'essentiel de leur financement sur le secteur agricole. Dans les villages, la pression démographique envenima les conflits autour de l'usage des communaux, à nouveau réglementé de près par les coutumiers. Vers 1700, il n'existait presque plus de zones ouvertes à tous entre les localités. Les villages disposant de communaux étendus et fertiles attiraient les immigrants, ce qui les conduisit à instaurer des taxes d'accès à leur bourgeoisie (ou à les augmenter) et à restreindre la jouissance des droits d'usage en les liant à la possession d'une maison.
On sait que dans le canton de Lucerne, à la fin du XVIe s. et au début du XVIIe, les enclosures sur les soles et les communaux augmentèrent, de même que les partages de communaux et de forêts. Ce phénomène résulte de mutations qui touchèrent sans doute à cette époque l'ensemble du Plateau suisse. Le morcellement des terres dû à l'essor démographique et aux partages successoraux entraîna une croissance disproportionnée des groupes de paysans pauvres, à qui l'on donna des terres sur les communaux, pour qu'ils les cultivent ou même qu'ils s'y installent (hameaux de Tauner). En revanche, les enclosures sur les soles profitèrent surtout aux paysans aisés et le fossé social se creusa entre ceux-ci et les Tauner. La multiplication des petites exploitations conduisit aussi à introduire, au XVIe s., le système de la recette générale, où un paysan, le collecteur, recueillait au nom du seigneur les cens de tout un groupe de parcelles. Dans les vallées centrales des Alpes, où prédominaient les petits paysans, la hiérarchie socio-économique était plus différenciée. Elle était préservée de tout changement brusque par le mélange de jouissance et de propriété privées et collectives (qui pouvait atteindre une haute complexité, comme dans la vallée de Conches) et par les systèmes d'exploitation communautaire visant à équilibrer les intérêts. Dans le reste des Alpes en revanche, la production confirma son orientation exportatrice (gros bétail, fromage) et le marché foncier s'anima, de plus en plus soutenu par un afflux de capitaux provenant du patriciat urbain (Berne, Fribourg, Lucerne, sud du Tessin) ou de l'aristocratie rurale (Grisons, Valais), ce qui accéléra l'endettement agricole en dehors des liens féodaux.
Du XVIIIe au XXe siècle
L'Ancien Régime et la République helvétique
Les structures agraires ne changèrent guère avant la fin du XVIIIe s. Les diverses formes de tenures et les redevances féodales subsistèrent en droit jusqu'à la chute de l'Ancien Régime. Néanmoins, le tenancier disposant d'un bail héréditaire vit sa position se renforcer; il fallait pratiquement qu'il n'ait pas payé le cens durant plusieurs années pour risquer d'être chassé. Il avait des droits qui dépassaient largement la possession et se rapprochaient de fait, bien avant 1798, de la propriété: il avait le libre usage du sol, pouvait le léguer, le vendre et l'hypothéquer à des tiers par le biais notamment de la lettre de rente. Les seules limites étaient les droits féodaux, transformés en charges foncières. Le cens était fixe, même en cas de plus-value. Cela poussait le tenancier à améliorer son bien et à augmenter la production, car le revenu supplémentaire lui appartenait entièrement.
Les règles collectives d'exploitation restèrent un facteur déterminant, de même que le droit successoral. Ce dernier variait de canton à canton. On constate de manière générale que le partage réel prédominait dans les régions d'habitat groupé, alors que dans les zones d'habitat dispersé, on privilégiait un héritier afin de ne pas diviser les domaines. Il s'agissait tantôt du fils cadet (minorat), tantôt de l'aîné (majorat), mais il devait dédommager les autres héritiers. Les principes ici esquissés à grands traits se concrétisaient de différentes manières; il existait de nombreuses variantes locales, notamment pour les règles relatives au partage et à la situation des veuves. Les études récentes laissent à penser que ces règles étaient souvent appliquées avec beaucoup de souplesse par les intéressés et que les autorités le toléraient. Dans la plupart des cas, les règles d'usage villageoises étaient conçues de façon à éviter les querelles; elles touchaient principalement la jouissance des communaux et la conduite de l'assolement.
La République helvétique amena une profonde modification des structures agraires. Le chapitre 13 de sa Constitution prévoyait le rachat des charges féodales. Répondant aux attentes de la population paysanne, les autorités prirent des décisions rapides, voire précipitées. Le 4 mai 1798, elles abolirent le servage, les charges qui en dérivaient et les corvées, puis suspendirent la perception des cens et dîmes. Mais, dès septembre 1800, elles décidèrent que les cens fonciers de l'année devraient être à nouveau payés. En 1801, elles firent de même pour les dîmes, ce qui déclencha des troubles sévères dans plusieurs cantons. A la fin de l'Helvétique, seule restait en vigueur la réglementation sur le rachat des cens et des grosses dîmes.
XIXe et XXe siècles
Les règles successorales changèrent avec l'entrée en vigueur des codes civils cantonaux. L'assolement obligatoire subsista plus ou moins longtemps selon les régions avant d'être supprimé ou de devenir obsolète à cause de l'évolution de la propriété. Quelques cantons conservèrent le cadastre créé sous la République helvétique à des fins d'inventaire. L'unification du droit de la propriété foncière par les codifications cantonales prépara une opération analogue au niveau fédéral, commencée dans le dernier quart du XIXe s. La Constitution fédérale de 1874 permit la promulgation du Code des obligations en 1881 et (grâce à une modification introduite en 1898) celle du Code civil suisse en 1907. Le premier contenait des règles importantes pour l'agriculture (sur la vente immobilière, le bail à ferme, la société coopérative), le second plus encore (sur le droit successoral, avec des dispositions spéciales pour les entreprises agricoles, sur la propriété, la possession, le gage immobilier). Toutes ces normes furent modifiées à plusieurs reprises et adaptées à l'évolution de l'agriculture suisse (Politique agricole) dans diverses lois fédérales, comme les lois sur le désendettement de domaines agricoles (1940), sur le maintien de la propriété foncière rurale (1951), sur l'amélioration de l'agriculture et le maintien de la population paysanne (1951, dite loi sur l'agriculture, révisée en 1998), la loi modifiant le droit civil rural (1972) ou celle sur le droit foncier rural (1991).
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