Station littorale du Néolithique, anciennes communes d’Auvernier et de Colombier, commune de Milvignes (NE), sur la rive nord du lac de Neuchâtel, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco en 2011.
La baie d’Auvernier est un vaste espace situé entre le contrebas du château de Colombier et l’ancien port d’Auvernier. Cette zone - et ses abords - est la région du canton de Neuchâtel la plus densément exploitée et peuplée au cours de la préhistoire, plus particulièrement à l’époque de la culture de Lüscherz où six villages se sont succédé ou ont été occupés simultanément. Par commodité, le site de La Saunerie, fut attribué à Auvernier, bien qu’il s’étende en partie sur le territoire de Colombier.
La station fut découverte lors de la sécheresse exceptionnelle de l’hiver de 1853-1854, comme bon nombre de sites palafittiques en Suisse. Elle était alors située à 100 m du rivage et partiellement exondée, laissant apparaître une légère butte formée d’un amas de galets d'où dépassaient des pilotis, ou un Steinberg (ténevière en français) selon la description d’Edouard Desor en 1861. Elle figure sur plusieurs relevés cartographiques de la baie d’Auvernier, effectués par le colonel Louis-Alphonse de Mandrot, en 1878 et 1880, puis par le cartographe Maurice Borel en 1905.
Sous la direction de Paul Vouga, la Commission neuchâteloise d’archéologie préhistorique entreprit la première exploration méthodique du site, par l’ouverture de sondages en 1919, puis entre 1920 et 1930. Ces travaux marquèrent le début des recherches de Vouga en vue d’établir une classification du "Néolithique lacustre". Elles lui permirent de décliner la chronologie du Néolithique suisse en quatre phases distinctes: Auvernier IV - "Néolithique lacustre" ancien; Auvernier III - Néolithique moyen; Auvernier II - Néolithique récent; Auvernier I - Enéolithique. En 1948 et 1950, André Leroi-Gourhan et Samuel Perret effectuèrent à leur tour des petites fouilles à plusieurs endroits du site. Ils confirmèrent non seulement la stratigraphie établie par leur prédécesseur, mais parvinrent encore à identifier un nouvel horizon de transition entre le Néolithique lacustre ancien et moyen (Cortaillod tardif).
En raison de la construction de l’autoroute A5 planifiée à travers la baie d’Auvernier, deux importantes opérations d’archéologie préventive furent réalisées à La Saunerie, en 1964-1965 sous la direction de Christian Strahm, puis conduites par Jean-Luc Boisaubert de 1972 à 1975. A l’intérieur d’un caisson de palplanches de 200 m2, Strahm individualisa deux horizons archéologiques, correspondant aux ensembles Auvernier I et II de Paul Vouga, qu’il attribua ensuite à un nouveau faciès culturel sous le nom de Auvernierkultur (culture d'Auvernier, aujourd’hui Auvernier-Cordé), caractérisé par la présence de céramique cordée et de poignards en silex du Grand-Pressigny. Plus tard, la dendrochronologie confirma l’insertion des deux horizons stratigraphiques à deux phases d’occupation distinctes: 2634-2550 et 2550-2434 av. J.-C. En outre, sur la base de recherches menées à la même époque sur des sites du lac de Bienne, Christian Strahm identifia une nouvelle culture matérielle - le groupe de Lüscherz - qu’il rattacha à l’ensemble Néolithique moyen (Auvernier III) de Paul Vouga.
Enfin, les dernières investigations, entreprises entre 1972 et 1975, révélèrent une importante séquence archéologique rattachée aux cultures du Cortaillod classique et tardif, au groupe de Lüscherz ainsi qu’à l’Auvernier-Cordé; la dendrochronologie a donné plusieurs phases d’abattage pour le Cortaillod tardif (3637-3633 et 3600-3597 av. J.-C.) et le Lüscherz (2784-2701 av. J.-C.).
Avec une surface estimée à 3,2 ha, le gisement de La Saunerie, aujourd’hui entièrement remblayé, est le plus vaste de tous les sites de la baie d’Auvernier. Il en est également celui qui offre le plus grand potentiel scientifique, permettant ainsi à de nombreux chercheurs de construire la chronologie du Néolithique suisse, voire de définir de nouvelles cultures matérielles (Cortaillod tardif, Lüscherz, Auvernier-Cordé). Malgré la quantité de données recueillies, il n’est toujours pas aisé de restituer l’organisation et la disposition en plan des villages les uns par rapport aux autres. La zone de La Saunerie semble avoir été occupée d’abord en retrait dans le fond de la baie au Néolithique moyen (Cortaillod), puis progressivement en direction du lac.