Stations littorales du Néolithique et de l’âge du Bronze, commune d’Yverdon-les-Bains (VD), à l’extrémité sud-ouest du lac de Neuchâtel, inscrites au patrimoine mondial de l’Unesco en 2011 sous le nom collectif de Baie de Clendy.
Le vaste ensemble de sites littoraux de la Baie de Clendy se trouve proche de la ville d’Yverdon-les-Bains, dans une zone en voie de forte urbanisation, où il est soumis à une pression constante du développement de la ville. Il s’agit de l’un des complexes palafittiques les plus importants de Suisse occidentale: pas moins de six villages furent occupés entre le Néolithique moyen et l’âge du Bronze ancien, avec des interruptions dues à la remontée du niveau des eaux.
Les premières découvertes de vestiges d’habitats palafittiques n’intervinrent que dans les années 1960, soit près d’un siècle après la première correction des eaux du Jura (1868-1891). Ce retard est dû à l’enfouissement considérable des niveaux archéologiques et à l’absence de structures apparentes dans la zone lacustre immergée.
La première fouille eut lieu en 1962, à l’Avenue des Sports, sur une surface de 200 m², avant la construction d’un garage. A la suite de ces découvertes, des fouilles systématiques furent entreprises, qui se poursuivirent lors de plusieurs campagnes entre 1969 et 1975, réalisées en collaboration avec l'Institut de préhistoire de Fribourg-en-Brisgau. En 1973, les terrassements pour la pose d’une citerne permirent l’étude d’une surface de 24 m², qui mit en évidence une séquence archéologique s’échelonnant du Néolithique moyen à l’âge du Bronze ancien. En 1988-1989, les recherches reprirent sous la direction de Claus Wolf, avec l'étude d'un secteur de 240 m². Au total, neuf phases furent mises en évidence et révélèrent une stratigraphie exceptionnelle, du Néolithique moyen à la fin du Néolithique final, qui représente depuis lors une séquence de référence, basée sur la typologie de la céramique, pour le Néolithique de la région des Trois-Lacs.
La stratigraphie globale du site témoigne de la superposition des occupations humaines, entre le Néolithique moyen tardif et le Bronze ancien. Plusieurs interruptions de l’habitat sont documentées et interprétées comme des transgressions du lac. Ainsi, à un premier habitat du Cortaillod tardif interrompu par une inondation violente succéda un établissement de la culture de Lüscherz, qui a livré un très riche outillage de bois de cerf. Le village se déplaça ensuite vers le lac, à la fin du Néolithique final, mais il fut à son tour abandonné à cause d'une forte inondation. Enfin, au Bronze ancien, un nouveau village s'implanta exactement à l’emplacement du site du Cortaillod tardif.
La particularité des stations de la Baie de Clendy, recouvertes de sédiments lacustres et alluvionnaires, réside dans leur état de conservation dû à la profondeur des couches, qui a favorisé l'excellente préservation des vestiges organiques, et à leur localisation: l’extrémité sud-ouest du lac de Neuchâtel bénéficie de la conjonction de circonstances à la fois géomorphologiques et géographiques particulières.
D’une part, plusieurs cordons littoraux, anciennes lignes de rivage qui s’échelonnent du lac vers la ville ancienne, jalonnent les différentes phases d’habitat et marquent une quasi continuité dans l’occupation du territoire. Le plus ancien cordon littoral, côté lac, est daté du 4e millénaire av. J.-C. C’est sur cette formation riveraine qu’a été érigé l’un des plus grands sites mégalithiques de Suisse occidentale. Ce lieu cultuel et symbolique, regroupant 45 mégalithes anthropomorphes à la Promenade des Anglaises, est apparemment en relation avec les premiers établissements littoraux, soit ceux du Néolithique moyen, vers 3860 av. J.-C. La Baie de Clendy connut des occupations palafittiques jusqu’à l’âge du Bronze final, soit vers 1000 av. J.-C.
D’autre part, la situation géographique de cet ensemble de sites, au carrefour de plusieurs domaines culturels, entre le bassin lémanique, la région des Trois-Lacs et le Jura qui donne accès à la plaine de la Saône, vit se diversifier de nombreux groupes de peuplements qui ont fait la richesse de l’ensemble de la préhistoire du Plateau suisse.