Le pénitencier et établissement de travail forcé de Gmünden, situé à Teufen dans le canton d’Appenzell Rhodes-Extérieures, fut ouvert en 1884 pour le placement des personnes soumises à un internement administratif, à la détention pénale ou ne pouvant régler les infractions (débitrices et débiteurs d'amendes). Mixte à l’origine, l’établissement n’accepta que des hommes entre 1962 et 2017. Il servit dès les années 1980 à l’exécution des peines et mesures; la prison cantonale lui fut rattachée en 2007.
Bien que l’internement de personnes «débauchées» et «fainéantes» afin de décharger les maisons de pauvres dans les communes (institutions de confinement) fût au centre des préoccupations, l'établissement créé par décision de la landsgemeinde de 1880 était également destiné aux personnes condamnées par la justice. En 1883, le canton fit l’acquisition d'un bien-fonds à Gmünden, au sud-ouest de Niederteufen, et fit construire un nouveau bâtiment, prêt à être occupé dès l'année suivante, conçu pour recevoir 8 femmes et 40 hommes. Le chauffage central y fut installé en 1892, la lumière électrique en 1900 et des douches en 1935; l’ensemble des structures fut rénové dans les années 1940. Les fenêtres étaient munies de barreaux, les dortoirs fermés à clé durant la nuit, mais l’établissement ne fut entouré ni d’un mur ni d’une clôture et le personnel de surveillance n’était pas armé. Pendant longtemps, les personnes condamnées et internées n'étaient reconnaissables qu'à leurs uniformes aux rayures différentes. La séparation spatiale des différentes catégories de détenues et détenus, prescrite par le Code pénal fédéral de 1942 et par le Concordat d'exécution des peines et mesures de Suisse orientale de 1956, nécessita une transformation radicale et une extension de l'établissement (1961-1964), à la suite desquelles les femmes ne furent plus admises.
A la demande des communes, le Conseil d'Etat prononça des internements administratifs d’une durée allant jusqu'à trois ans, en se basant sur le règlement de l’établissement de 1884 (révisé pour la dernière fois en 1969) et la loi sur les pauvres (pauvreté) du canton d'Appenzell Rhodes-Extérieures de 1934 (assistance); une loi sur l'internement forcé fut rejetée par la landsgemeinde de 1937. La pratique de l'internement administratif ne fut cependant remise en question que de manière sporadique, les cinq recours de droit public déposés par des personnes concernées dans les années 1940 et 1950 ayant été rejetés. L'autorité de contrôle était la Commission de surveillance, présidée par le chef de la Direction de justice et police. Elle se réunissait deux fois par an dans l'établissement, approuvait le budget et les comptes, traitait les demandes et les recours, décidait la prolongation des peines d'arrêts et l'allongement de détention pour les personnes internées administrativement. Celles-ci, au nombre de 1252 entre 1884 et 1976, ne représentent que 15% des 8420 détenus, mais elles marquèrent davantage le quotidien de l'institution que les condamnés ou les débiteurs d’amendes (respectivement 78% et 7% de toutes les admissions), qui ne furent souvent enfermés que quelques mois ou quelques jours. Plus de la moitié des personnes internées administrativement le furent à plusieurs reprises, certaines ayant en outre été placées dans d'autres établissements comme le Kreckelhof (Hérisau) ou ceux de Bitzi (Mosnang), Kalchrain (Hüttwilen), Witzwil et Bellechasse. Gmünden fut également utilisé par d'autres cantons. Avant même l'abrogation des lois cantonales sur l’internement administratif en 1981, les derniers pensionnaires extra-cantonaux avaient été relâchés en 1976, le dernier ressortissant des Rhodes-Extérieures l'avait été en 1969 déjà.
Jusque vers 1950, Gmünden réussit généralement à s'autofinancer grâce au fonctionnement de l’établissement et à une politique de dépenses restrictive. Les principales sources de revenus étaient l'exploitation du domaine (production de lait, fruits et légumes, pépinière), abandonnée en 2000, le tissage (industrie textile) jusqu'en 1965, ainsi que diverses activités industrielles (notamment la fabrication de sacs en plastique et de sacs à ordures) de même que les frais de pension versés dès 1970 par les cantons et les communes qui avaient ordonné l’internement. Les personnes détenues étaient régulièrement employées dans les travaux domestiques et agricoles ainsi que dans les ateliers de l'établissement, mais aussi pour des travaux de récolte ou sur des chantiers hors de Gmünden, ce qui favorisait les contacts avec le monde extérieur et la contrebande, ainsi que les évasions. Des activités peu ou pas rentables (collage de sachets, extraction de gravier) contribuèrent également à l'objectif de plein emploi. Une indemnité de travail, le pécule, fut versée à partir de 1902. Modeste, elle était fixée individuellement et, en 1954 encore, n'était remise que le jour de la sortie. Les conditions de vie furent en tout cas mauvaises jusqu'à la rénovation des années 1940 (conditions d'hygiène précaires, température ambiante de 6 ºC en hiver) et, contrairement à la loi sur les fabriques de 1877, la durée hebdomadaire du travail était de 72 heures vers 1900, de 56 heures en 1970. Si les châtiments corporels (coups de verge) existèrent jusqu'en 1894 malgré l'interdiction légale, d'autres mesures punitives (menottes et entraves, camisole de force, rasage du crâne après une évasion) furent en vigueur parfois jusque dans les années 1960.
L’intendant, assisté de sa femme, était responsable de l’administration et du fonctionnement de l'établissement. Il avait sous ses ordres le personnel qui s’occupait des personnes détenues, les surveillait et leur donnait les instructions de travail. Lui-même, sa famille et les membres du personnel vivaient au sein de l'établissement ou dans des maisons construites sur le bien-fonds. Les journées de travail étaient longues, les salaires bas et la rotation des employés élevée. L’intendant pouvait infliger des sanctions disciplinaires (réduction de la nourriture, arrêts); les agressions du personnel envers les personnes détenues restaient souvent impunies. L’objectif de resocialisation passait principalement par le travail et la discipline. Les congés relationnels furent introduits en 1971, la semi-liberté en 1974, la semi-détention en 1980. A la suite de critiques internes et externes sur le régime d'exécution, un membre de la Commission de surveillance fut nommé ombudsman en 1976 et un service social créé dans les années 1980.
La nomination d’un nouvel administrateur en 1985 s'accompagna d'un recentrage sur l'exécution des peines, reléguant les activités agricoles au second plan. Gmünden se mua peu à peu en un établissement pénitentiaire moderne – avec obligation de réaliser un bénéfice depuis 2016. A partir de 2000, le profil des pensionnaires changea à nouveau: la catégorie des débiteurs d'amendes fut réintroduite par la réforme du droit pénal de 2007 qui instaura les peines privatives de liberté de substitution; les requérants d'asile déboutés ou les personnes sans autorisation de séjour sont passibles de détention sur décision administrative depuis 2008 d’après la loi sur les étrangers et l'intégration (LEI) de 2005; enfin, une section pour femmes fut rouverte en 2017.